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L'apithérapie, une médecine en or
© JupiterPropolis, pollen, gelée royale... Les abeilles ont depuis longtemps imposé leur pharmacopée naturelle et vivante. Et voilà qu’aujourd’hui, piqûres et venin révèlent à leur tour des vertus.
Caroline Wietzel
L'abeille thérapeute
Les Égyptiens la croyaient née des larmes du dieu soleil Râ, les Grecs la voyaient sous les traits de la déesse des récoltes Déméter. Les Celtes en firent le symbole de la sagesse, les chrétiens, celui de la résurrection. L’abeille suit l’histoire du monde et des hommes depuis la nuit des temps et jusqu’à aujourd’hui se fait sentinelle moderne de notre environnement. Mais la butineuse ne se contente pas d’être le baromètre de notre planète, elle est aussi gardienne de notre santé. Voilà des millénaires qu’elle joue les thérapeutes. Les premières traces de ses soins intensifs remontent à 1600 ans av. J.-C., et Hippocrate, père de la médecine, décline déjà les vertus d’une pharmacopée à base de miel.
Une action sur la cicatrisation
Aujourd’hui, l’« apithérapie » (du latin apis, « abeille »), dont le nom ne figure toujours pas dans le dictionnaire, sort de l’anecdote historique pour se frotter à l’exigence scientifique du monde médical. Largement dans certains pays, où, comme le précise Roch Domerego, biologiste de formation et naturopathe, « elle permet de remplacer valablement 70 % de la pharmacopée de première intention ». Plus modestement en Europe, où elle a besoin de s’appuyer sur des travaux et essais cliniques pour valider ses propriétés. En France, constate le professeur Henri Joyeux dans Les Abeilles et le Chirurgien, une vingtaine d’hôpitaux utilisent le miel, après que le professeur Bernard Descottes, également chirurgien, en eut démontré l’action sur la cicatrisation des plaies de trois mille cinq cents patients.
Le médicament sans effet secondaire
Se soigner à partir de ce que nous propose un être vivant est une démarche très différente de celle d’avaler un comprimé. D’un côté, un produit variable, sous influence régionale, climatique, saisonnière... De l’autre, la constance d’une formule fabriquée pour être toujours disponible. Préférer la pharmacopée naturelle au répertoire chimique, c’est se reconnecter avec une nature dont on s’est éloigné pour s’installer en ville, et accepter l’idée qu’elle nous veut, et nous fait, du bien. Dans ce domaine, la phytothérapie a su accumuler les preuves de sa bienveillance.
Pour l’apithérapie, c’est moins simple. On a beau savoir que l’abeille est indispensable à la biodiversité, elle a un capital sympathie moins grand que la plante verte, et son catalogue d’actifs paraît plus limité. Pourtant, la butineuse « est l’archétype même de la générosité, affirme Catherine Ballot-Flurin, pionnière de l’apiculture douce. Elle fabrique de l’or, le miel, et satisfait ses besoins sans jamais nuire à son environnement. Au contraire, elle l’enrichit grâce à la pollinisation ». Entre l’abeille et la nature, c’est du donnant-donnant, une sorte de pacte écologique basé sur le respect et la confiance.
L’abeille nous donnerait-elle en plus des leçons de savoir-être ? Pour Maryse Pioch, qui dit avoir « guéri [sa] sclérose en plaques » grâce au venin d’hyménoptère – famille d’insectes dont font partie les abeilles –, cela ne fait aucun doute : « L’apithérapie nous demande d’être à la fois plus près de la nature et plus près de soi. »
Préserver la richesse de ce qui nous entoure pour continuer à profiter de ses avantages, c’est presque une évidence. Etre à l’écoute de son corps, apprendre à en décoder les messages pour mieux utiliser les produits de la ruche, voilà qui est moins flagrant. « On ne soigne pas une maladie, mais une personne vivante avec ses émotions, ses sensations », précise Catherine Ballot-Flurin.
À la différence de l’allopathie, l’apithérapie ne se contente pas d’agir sur le symptôme, mais sur l’équilibre de notre organisme tout entier. Vivre ce qui se passe à l’intérieur de soi, sentir cette vague de chaleur, ce léger picotement, et lier cette sensation à l’abeille, ouvre à l’expérience de la gratitude, dont on sait qu’elle affaiblit les émotions négatives. « C’est la victoire du mieux-être sans la peur des effets secondaires d’une prescription médicamenteuse classique », confirme Maryse Pioch. Mais son expérience reste singulière et, à ce jour, nulle étude ne vient corroborer son récit.
La jeunesse sans le lifting
A découvrir
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Miel, pollen, propolis, gelée royale, cire... L’abeille n’est pas avare et va jusqu’à donner d’elle-même quand il s’agit de soigner les plus fragiles. C’est alors son venin qui fait office de médicament. Hippocrate en son temps en faisait le remède idéal contre l’arthrite. Aujourd’hui, la médecine s’intéresse à son action dans le traitement de la sclérose en plaques, mais aussi de pathologies moins graves comme la tendinite ou les affections respiratoires. Allergiques s’abstenir, âmes sensibles aussi, puisque c’est l’insecte qui pique en direct, à moins que le thérapeute ne se tourne vers des modes d’administration plus doux : crèmes, gouttes, comprimés... Pour venir à bout de son mal considéré comme incurable, Maryse Pioch avoue avoir accumulé les piqûres d’abeilles progressivement jusqu’à atteindre trente-cinq injections en une seule journée. Notons qu’elle vient d’une famille d’apiculteurs et que sa connaissance des abeilles n’est pas transposable
D’autres substances issues de la ruche trouvent naturellement le chemin de notre armoire à pharmacie, dès lors que leur usage est maîtrisé. Le pollen remplace efficacement les probiotiques qui restaurent la flore intestinale, la gelée royale se substitue aux complexes vitaminiques pourvoyeurs d’énergie, la propolis fait office de désinfectant et de cicatrisant... « Choisir les matières apicoles, c’est offrir à son corps un patrimoine immunitaire vieux de 100 millions d’années », souligne Catherine Ballot-Flurin.
Un Botox au naturel
Portés par la vague d’une beauté de plus en plus écologique, les laboratoires de cosmétique infusent un peu d’authenticité au cœur de formules hypertechnologiques. Désormais, l’abeille travaille aussi à notre jeunesse. Chez Guerlain, on combine miel et gelée royale pour stimuler les mécanismes clés du processus de cicatrisation au sein de la peau, afin qu’elle lutte contre l’apparition des rides et du relâchement. Du miel encore, mais de manuka auquel on prête des vertus antibactériennes (Comptoir & Compagnie), pour réparer les peaux abîmées ; et de tilleul mélangé à l’huile essentielle de ciste chez Sanoflore pour réconforter les épidermes sensibles.
Mais c’est le venin, encore lui, qui crée le buzz. Outre-Manche, c’est le nouvel actif miracle. La melittine contenue en lui ferait « croire » à la peau qu’elle a été piquée, augmentant ainsi le flux sanguin et stimulant la production de collagène et d’élastine. Un Botox au naturel qui lifterait déjà le visage des stars... et celui de la jeune duchesse de Cambridge, Kate Middleton. On ne s’éloignerait pas un peu du message des abeilles ?
L'ordonnance apicole
Le miel, recommandé contre les affections des voies respiratoires (miel de sapin ou de montagne), est aussi un excellent antibactérien à appliquer directement sur les brûlures (miel de thym ou de lavande) ou les coupures (miel de châtaignier) afin de régénérer les tissus.
Le pollen est un complément alimentaire riche en protéines (une cuillerée à soupe vaut cent grammes de viande environ). Attention : à chaque pollen son action. Le pommier renforce le système immunitaire, le ciste règle les problèmes digestifs, le châtaignier est antioxydant. Très yang, il veille aussi à la bonne vitalité des organes génitaux masculins.
La gelée royale, appelée aussi « lait d’abeille », est le produit de la ruche le plus élaboré. Très yin, elle stimule l’énergie vitale et favorise l’équilibre de la femme. À consommer fraîche.
La propolis s’utilise avec parcimonie, un peu comme un produit d’urgence. Sous forme de spray sans alcool pour réveiller l’immunité naturelle lors d’affections pharyngées ou d’allergies saisonnières ; avec alcool, lorsque l’organisme peine à se défendre contre les microbes et que le mal de gorge se fait « cuisant ».
Merci à Catherine Ballot-Flurin, apicultrice.
Pour aller plus loin
À lire :
Les Abeilles et le Chirurgien d’Henri Joyeux. Les abeilles, l’apiculture, l’apithérapie : pour tout savoir sur le monde merveilleux
et fragile des butineuses (Éditions du Rocher, 2012).Ces abeilles qui nous guérissent de Roch Domerego. Pour mieux appréhender les produits de la ruche comme solution de santé naturelle (JC Lattès, 2011).
Les Bienfaits de l’apithérapie de Catherine Ballot-Flurin. Comment utiliser les produits de la ruche au quotidien (Eyrolles, 2009).
L’adresse :
L’Association francophone d’apithérapie (AFA), fondée par le professeur Bernard Descottes, chef de service de chirurgie viscérale et transplantations au CHU de Limoges. Rens. : 07 86 52 18 59 ou apitherapiefrancophone.com (site Internet très complet : remèdes, formations, adresses...).
Source ; Psychologies.com
Tags : Abeilles, Sagesse de la nature, Médecine naturelle
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